Raids meurtriers des militaires français au Mali

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Cinq jours après l’attaque française sanglante contre ce qui « devait » être des terroristes, les informations provenant du Mali contredisent la version de l’armée française. Mais que s’était-il réellement passé dimanche 3 janvier près de Douentza, dans le centre du Mali? L’armée française dit que ses avions ont éliminé des dizaines de djihadistes.

 Le mardi 5 janvier, l’état-major français a reconnu avoir mené une opération antiterroriste, et faisait cette déclaration à l’AFP : « Une patrouille d’avions de chasse a « neutralisé » des dizaines de djihadistes préalablement repérés après une opération de renseignement de plusieurs jours. Les informations relatives à un mariage ne correspondent pas aux observations effectuées ».

Nos sources au Mali démentent catégoriquement cette version des faits. Pour elles, il s’agit une « opération belliqueuse et revancharde qui a mal tournée ». La veille, soit le samedi 2 janvier, deux militaires français ont succombé à leurs blessures après que leur véhicule blindé léger ait été atteint par un engin explosif improvisé (IED) dans la région de Ménaka au Mali. Cinq jours plus tôt, trois autres soldats de Barkhane avaient trouvé la mort de la même manière à Hombori dans le cercle de Douentza. Ces décès portaient à cinquante-cinq le nombre de militaires français décédés au Sahel. Pour l’état-major français, il « fallait venger ses soldats coûte que coûte ! ». D’où la rapide riposte aérienne.

   Toutefois, trois indices viennent remettre en cause la version française et confirmer la thèse d’une « bévue ». Le premier nous vient du communiqué de l’ONG « Médecins sans Frontières » (MSF) qui dit avoir pris en charge « huit blessés graves suite à des bombardements sur les villages de Bounty et Kikara, dans le centre du Mali, le dimanche 3 janvier 2021 », ce qui renseigne réellement qu’il s’agissait de peuls civils et non de militaires. Le second nous vient de Mme Leslie Varenne, directrice de Contre d’Etudes internationales et stratégiques, qui, s’appuyant sur ses sources au Mali, dit que « des villageois célébraient un mariage et comme le veut la tradition peule, un groupe d’hommes s’est regroupé et éloigné du village pour faire griller le taurillon qu’ils avaient reçu en offrande. C’est pendant le méchoui qu’ils ont été la cible d’une frappe aérienne, il y a eu 16 morts selon cette source, d’autres citent le chiffre de 19 décès, et des blessés ».

   Le troisième indice nous vient de l’état-major de l’armée française elle-même. C’est en fait un demi-aveu. La ministre des Armées, Florence Parly, a annoncé dans « le Parisien » du 4 janvier, que la France allait « très probablement » réduire les effectifs de la force Barkhane. Selon Varenne, « le timing de cette déclaration est pour le moins curieux. D’une part, il ne paraît pas opportun de proclamer une réduction des hommes sur le terrain après des revers. D’autre part, les événements qui se produiront au cours des cinq à six prochaines semaines avant la grande réunion du G5 Sahel au Tchad seront décisifs dans les choix de la redéfinition du format et des missions de Barkhane ».

   Même si l’état-major de l’armée malienne est venu en dernier recours à la rescousse des Français, cela ne semble pas pouvoir changer les donnes de la rue malienne qui commence à pointer un doigt de plus en plus accusateur contre « Berkhane ».

Selon le communiqué officiel de l’État par rapport à l’attaque de Bounty, qui sème la controverse depuis dimanche, il est dit qu’au cours « d’une mission de surveillance de cette zone, des mouvements individuels, suivis de regroupement d’une cinquantaine d’individus ont été observés le dimanche 03 janvier 2021, vers onze heures. Ce regroupement ne comprenait ni femmes ni enfants. Par la suite, un motocycliste armé s’ajouta au regroupement, puis un véhicule pickup.

Aux environs de treize heures, ces éléments de la Katiba Serma, vêtus de la même façon, ont formé trois groupes. Ce regroupement de combattants, principaux auteurs d’attaques et de poses d’Engins Explosifs Improvisés (EE) sur la RN 16, principalement entre Douentza et Hombori, ont été qualifiés d’objectif militaire et l’intervention aérienne sollicitée par le Poste de Commandement Conjoint.

Les frappes aériennes effectuées par un mirage 2000 sur ledit objectif ont fait un bilan d’une trentaine de GAT neutralisés selon les images de la mission d’Observation et de Surveillance. Vers dix-sept heures, un groupe de villageois et d’hommes armés en véhicule pickup et motos, sont arrivés sur le site et ont procédé à l’inhumation des morts.

Les motocyclistes et les véhicules pickup ont récupéré les blessés avant de partir dans des directions différentes. Les rescapés ont occupé les hauteurs avec jumelles et postes talkie-walkie. L’environnement observé n’a montré ni scène de mariage, ni enfants ou femmes. Tous les renseignements recueillis en direct justifiaient que les cibles neutralisées étaient des objectifs militaires confirmés. Aussi, la zone comprise entre Hombori et Douentza est bien connue comme zone d’influence active de la Katiba Serma du Rassemblement pour la Victoire de l’Islam et des Musulmans (RVIM) qui y dispose de plusieurs centres d’entrainements, ateliers de confection EEI ».

    Cet appui des « temps morts » n’aura servi à rien, et les Français devront d’ores et déjà songer à changer de stratégie au Sahel, « Berkhane » ayant montré non pas uniquement ses limites tactiques et militaires, mais aussi son rejet par toutes les populations locales parmi lesquels elle aura tenté, vainement, depuis des années, à s’y incruster…

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