La Commission de la Défense nationale à l’Assemblée populaire nationale (APN) a tenu, lundi, une réunion consacrée à la présentation d’une proposition de loi portant criminalisation du colonialisme français en Algérie, a indiqué mardi un communiqué de la chambre basse du Parlement. La séance a été présidée par Younes Hariz, président de la commission.
Lors de cette réunion, à laquelle participait Zouhaier Nasri, président du groupe parlementaire du Front de libération nationale (FLN), M. Hariz a expliqué que cette proposition « incarne une conscience collective du peuple algérien à travers ses représentants, en phase avec le processus du renouveau du projet national, dans le cadre des choix de l’Algérie victorieuse qui a placé la préservation de la Mémoire nationale au cœur de ses priorités, sous la conduite du président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune, et avec l’appui des différentes composantes, élites et partis de la Nation ».
Cette initiative « s’inscrit dans le cadre de la fidélité aux sacrifices du peuple algérien et de la concrétisation de l’engagement constitutionnel pour la préservation et la protection de la Mémoire nationale contre l’oubli et la déformation, en s’appuyant sur les principes de la Déclaration du 1er novembre 1954 et le préambule de la Constitution de 2020 qui a consacré le devoir de fidélité aux martyrs et l’attachement aux valeurs de la Révolution de libération nationale », a ajouté le président de la Commission.
Il a rappelé que le colonialisme était « un système fondé sur l’assujettissement, le pillage, l’aliénation identitaire et la commission de crimes contre l’humanité », et a précisé que ce texte « qui s’aligne avec les valeurs et principes internationaux condamnant l’injustice et bannissant les crimes contre l’humanité, n’est pas contraire au dialogue ou à la coopération entre les Etats, mais aussi consacre des relations équilibrées fondées sur la reconnaissance de la vérité, le respect de la Mémoire et la réciprocité entre les nations, par fidélité à l’Histoire de l’Algérie et aux sacrifices de ses valeureux martyrs ».
Fateh Brikat, coordinateur de la commission chargée de la rédaction de la proposition, a présenté les motifs du texte, soulignant qu’« elle vient en réponse au devoir d’établissement de la justice historique et de préservation de la Mémoire nationale, en hommage aux âmes des martyrs tombés au champs d’honneur pour libérer l’Algérie du joug du colonialisme français et en reconnaissance de leurs sacrifices ». Il a rappelé « la gravité des violations commises par les autorités coloniales françaises à l’encontre du peuple algérien, qualifiées de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, étant imprescriptibles et parmi les crimes les plus graves en droit international ».
Selon lui, « le besoin s’est fait sentir de mettre en place un mécanisme juridique criminalisant le colonialisme français en Algérie et d’imputer au gouvernement français la responsabilité juridique des faits perpétrés durant la période allant de 1830 à 1962, en rejet du raisonnement de la mise sur un pied d’égalité de la victime et du bourreau ».
Il a ajouté que « cette proposition de loi se réfère aux principes consacrés dans le droit international, qui affirment le droit des peuples à l’équité juridique, à la concrétisation de la justice historique et au refus de l’impunité. De même qu’elle vise à établir les responsabilités et à obtenir la reconnaissance et les excuses officielles pour les crimes d’occupation, en tant que fondement de la réconciliation avec l’histoire et de la préservation de la Mémoire nationale ».
La proposition « renferme 5 chapitres comportant 27 articles, axés sur la définition des objectifs de la proposition, la délimitation des crimes du colonialisme français en Algérie, les dispositions juridiques relatives à la responsabilité de l’Etat français quant à son passé colonial, les mécanismes de revendication de la reconnaissance et des excuses officielles pour ces crimes, ainsi que l’adoption de dispositions pénales criminalisant la glorification ou la promotion du colonialisme ».
Les membres de la commission de rédaction, dont Abderrahmane Kadri, Zakaria Belkhir, Fatma Bida, Kamel Benkhelouf, Smail Mira et Djouzi Meziane, ont ensuite présenté le contenu de la proposition aux membres de la Commission de la Défense nationale. Le débat qui a suivi a permis aux députés d’exprimer « leur fierté à l’égard de la proposition de loi », qualifiant celle-ci de « document historique reflétant la mémoire du peuple algérien », tout en saluant « les efforts consentis par la commission de rédaction ». Certains ont formulé des observations et propositions visant à renforcer la valeur juridique et historique du texte.
Des représentants d’organisations nationales auditionnés
La Commission a également auditionné des représentants d’organisations nationales pour enrichir la proposition. Le président de la commission, Younes Hariz, a estimé que réclamer à la France la reconnaissance des crimes qu’elle a commis était une « victoire pour la justice et le droit », et a rappelé que « les crimes qui touchent à la dignité des peuples sont imprescriptibles ». Il a ajouté que les Algériens « n’oublieront jamais les crimes commis par la France coloniale durant 132 ans ».
Khelifa Smati, Secrétaire général de l’Organisation nationale des enfants de chouhada (ONEC), a salué la proposition, précisant qu’« elle est en accord avec les positions de l’Etat algérien, et à sa tête le président de la République, M. Abdelmadjid Tebboune ». Elle vise à « protéger la mémoire nationale des tentatives d’occultation, d’altération et de falsification », et constitue « une étape historique après de longues années d’attente ».
Pour sa part, Hamza Aoufi, Secrétaire général de l’Organisation nationale des moudjahidine (ONM), a rappelé que « le peuple algérien a donné une leçon à la France coloniale qui a tenté par tous les moyens d’étouffer les résistances successives », insistant sur « l’imprescriptibilité de ses crimes contre les Algériens ».
Le projet, qui sera débattu à l’APN la semaine prochaine, repose sur « les principes du droit international consacrant le droit des peuples à l’équité juridique et à la justice historique et la fin de l’impunité ». Il vise à « établir les responsabilités » et à « obtenir une reconnaissance et des excuses pour les crimes coloniaux commis, comme préalable à toute réconciliation avec l’histoire, et ce, dans le cadre de la préservation de la mémoire nationale ».
La proposition de loi comporte cinq chapitres et 27 articles, définissant la finalité de la loi, qualifiant juridiquement les crimes de la colonisation française de 1830 à 1962, et précisant la responsabilité du gouvernement français. Elle inclut aussi des dispositions sur les réparations, la criminalisation de la glorification de la colonisation, la protection des symboles de la Résistance, et la restitution des biens, archives et restes mortuaires des figures de la Révolution.





















